Peut-être l'avez vous remarqué, j'aime les romans où l'auteur nous laisse entrevoir (un peu) ce que peut être l'acte d'écrire, ou du moins, lorsqu'au détour d'une phrase, on peut sentir sa présence en filigrane.
Evidemment, les auteurs à l'ego surdimensionné qui n'écrivent que pour parler d'eux n'entrent pas vraiment dans cette catégorie. Tout doit se faire en finesse, l'apparition doit se justifier.
C'est on ne peut plus vrai dans ce roman, il me vient en particulier une scène remarquable dans laquelle le héros se trouve dans une situation extrêmement intime avec une dame : il existe de magnifiques scènes d'amour en littérature, il en existe aussi de très mauvaises et c'est un peu sous cet angle que Soazic Aaron choisit de nous raconter celle-ci : comment faire pour exprimer le désir, la passion sans glisser dans le voyeurisme ou la plate pornographie descriptive ? Et sous ces interrogations, elle réussit à donner vie à une étreinte passionnée.
Mais ce n'est qu'un exemple du talent avec le quel cet auteur mêle la fiction et la réflexion sur ce qu'est l'écriture. Elle s'amuse à brouiller quelque fois les fils, on ne sait plus vraiment qui parle : personnage, narrateur, auteur...
Tout ceci est mené avec talent et l'on sent une véritable jubilation à manier la langue, à jouer avec les mots, les phrases. Elle entraîne son lecteur dans des divagations qui peuvent aller de la longueur de jambe des pantalons du héros, Jean, géant de deux mètres qui revient tardivement du front de la guerre de 14-18, au devenir des campagnes bombardées des alentours de Verdun.
-> La sentinelle tranquille sous la lune, Soazig Aaron, Ed. Gallimard, 18.90€
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